Le gardien du ruisseau (extrait 3)
Troisième mouvement
Couché sur un lit, un crucifix entre les mains, le père expire.
LE PERE
Occupe toi de ta mère, toi seul le peux. T’as pas de femme, pas d’enfant, pas de maison … Tu vas pas abandonner ta mère. Du repos, voilà ce qu’il lui faut, du repos. La maison , onze enfants, le linge, les repas … On lui doit bien ça, non, le repos. Cesse de sousquer René. Le repos contre l’oustal. Toi seul le peux René, toi seul …
RENE
J’ai bon dos. Bougre de chien. Toi t’es mort, t’as une tombe, des fleurs tous les dimanches avant l’apéro. Le repos, au diable le repos. C’est toi qu’ose parler de repos, toi qui te débraguais à chaque fois que ça te chatouillais, que tu quillais. T’attrapais la mère et tu lui semais un enfant l’un après l’autre. Ibrougnasse … La mère, du repos … Quelle couillonade … Du repos … Je suis si fatigué que j’ai le cap qui fume … Et le frère, t’en parle pas de celui-là. Il existe pas pour toi. A l’oustal ! Faut pas que le village le voit … Qu’est-ce qu’y vont dire ? Mais pauvre fou, personne ne sait pas qu’un débile habite à la maison. La mère, le frère, c’est plus tenable. J’veux me sentir libre …